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Quatre ans après le «génocide» et le «féminicide», les Yézidis sont encore une communauté menacée

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Le 3 août 2014, Daech a lancé une vaste campagne d’enlèvement, de viol, d’esclavage sexuel, de commerce illicite d’êtres humains et d’autres crimes contre la communauté Yézidie et d’autres groupes minoritaires vivant dans la région de Sinjar, dans le nord de l’Iraq. Durant cette attaque génocidaire, des centaines de personnes ont été exécutées et des milliers de femmes ont été capturées par Daech pour être vendues sur les marchés du sexe. Au cours du mois d’août 2014, les massacres de Daech vont se succéder avec extrême violence, barbarie, inhumanité. Les hommes sont exécutés sommairement, les femmes réduites à l’état d’esclaves sexuelles. Les enfants, quand ils ne sont pas assassinés, sont embrigadés pour servir le « califat » naissant.

Les survivants qui ont réussi à fuir (20 000 à 30 000 personnes selon le Haut Commissaire pour les réfugiés des Nations Unies), confinés sur les hauteurs du mont Sinjar, sans de l’eau ni de la nourriture, devront attendre le secours tardif de la coalition internationale et de l’armée kurde. Les forces militaires ouvrent finalement un corridor humanitaire quinze jours après le début des massacres. On estimait entre 500 000 et 700 000, le nombre d’yézidis dans le monde et près de 320 000 peuplaient la région du Sinjar avant l’intervention de l’État islamique. Ils ne seraient plus que 50 000 aujourd’hui, selon l’ONG Yazda. Toutefois, l’ampleur de ce génocide et féminicide, considéré par les Yézidis comme le 74e massacre de leur histoire n’est pas encore déterminé avec précision. De même, on ignore le nombre de civils exécutés et on ne sait pas précisément combien de femmes et enfants ont été enlevés.

Tous les 3 août, des commémorations sont organisées dans de nombreux pays, mais la requête d’une reconnaissance politique internationale du « Génocide Yézidi » n’est pas encore arrivée de manière considérable de la part de la communauté internationale. À présent, de nombreuses représentations nationales ou supranationales ont reconnu le signe génocidaire des crimes perpétrés par les jihadistes. Le Parlement européen a déclaré en février 2016 que le groupe EI commettait « un génocide contre les chrétiens, les yézidis et d’autres minorités religieuses et ethniques ». La même expression par le Congrès américain dans une résolution adoptée le mois suivant, au mois de mars 2016. Un rapport des Nations Unies, publié en juin 2016, a reconnu que le peuple Yézidis a subi un génocide depuis que Daech a envahi leur région. Au mois de septembre 2016, le gouvernement irakien et les Nations Unies ont signé un accord commun pour prévenir et combattre les violences sexuelles liées aux conflits. Bagdad a récemment annoncé la création d’un comité interministériel avec l’ONU pour un travail de compilation de témoignages d’exactions qui devrait permettre, dans un lendemain plus ou moins proche, d’engager des actions devant des tribunaux pour génocide du peuple Yézidis, mais pas devant la Cour pénale internationale.

Pourquoi pas devant la Cour pénale internationale ? Parce que la Cour serait impuissante face aux crimes des jihadistes. L’institution internationale n’a pas de compétence territoriale sur la Syrie et l’Irak, pays qui ne sont pas sujets étatiques au Statut de Rome. La Cour serait seulement compétente de juger les ressortissants de pays parties de l’institution pénale et qui sont venus combattre dans les rangs de l’organisation État islamique. Depuis quatre ans de ces évènements, les communautés yézidies de par le monde remuent ciel et terre pour obtenir justice. Bien que Daech ait été défait militairement, des milliers d’yézidis sont encore portés disparus et aucun membre de l’ancien État islamique n’a été poursuivi pour les crimes de violences sexuelles.

Les Yézidis, leur religion et leur culture sont aujourd’hui à nouveau menacés : dans le cadre de l’invasion d’Afrin qui a débuté en janvier 2018, la Turquie et ses alliés ont détruit de nouveau nombre de villages et quartiers habités par les Yézidis ainsi que des lieux saints leur appartenant. Par ailleurs, les occupants d’Afrin s’adonnent quotidiennement aux pillages, enlèvements et assassinats des membres de la communauté.

Le génocide a été condamné vendredi par Pramila Patten, représentante de l’ONU sur la violence sexuelle dans les conflits à l’occasion de ce triste anniversaire. « Des histoires horribles qui devraient choquer la conscience de l’humanité », a déclaré Pramila Patten. « L’idéologie de Daech ne peut être véritablement vaincue que si les survivants reçoivent justice et réparation pour les crimes qu’ils ont subis. La réconciliation ne peut avoir lieu que si les personnes disparues sont retrouvées », a souligné Pramila Patten. « Quatre ans après les attaques contre Sinjar, aucun des auteurs de violences sexuelles liées au conflit de Daech n’a été traduit devant un tribunal et les besoins des survivants et de leurs enfants restent immenses », a déclaré la Représentante onusienne.

Enfin, outre la justice, les victimes de violences sexuelles ont toujours besoin d’un soutien médical et psychosocial et attendent d’être réunies avec des membres de leurs familles portés disparus.

Antonio Torrenzano


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